Pourriez-vous nous parler de votre parcours ?
Fany Cérèse : Durant mes études d’architecture, j’ai remporté le concours d’idées de la CNSA en 2007, visant à imaginer les maisons de retraite de demain. Cette expérience m’a conduite à travailler au sein de la Maison de Retraite Protestante de Montpellier, où j’ai réaménagé les espaces afin que les résidents s’y sentent chez eux. Après trois années enrichissantes, cette expérience a nourri mon sujet de diplôme puis de doctorat en architecture, intitulé Environnement architectural, santé et domesticité : étude des effets d’un aménagement architectural domestique sur la qualité de vie, l’usage et la perception de l’espace dans les lieux de vie institutionnels pour personnes âgées.
Vous avez ensuite cofondé l’atelier AA - Architecture Humaine. Quelles en sont les ambitions ?
En 2016, à l’issue de ma thèse, j’ai effectivement cofondé cette une agence spécialisée dans la transformation de l’offre médico-sociale, avec une approche domiciliaire et inclusive. Notre démarche repose sur une base scientifique solide : nous avons l’agrément Crédit impôt recherche, nous publions des articles scientifiques, et nous collaborons avec des doctorants et jeunes docteurs. Nos travaux portent sur les besoins environnementaux des personnes atteintes de troubles neuro-évolutifs, ainsi que sur les liens entre environnement et neurodéveloppement moteur et sensoriel. Nous nous intéressons aussi à l’impact architectural et spatial sur le bien-être des usagers (résidents, proches, professionnels), l’autodétermination, les troubles du comportement et les interactions sociales.
Pourquoi cet intérêt particulier pour le grand âge et les EHPAD ?
Le sujet est tout simplement passionnant ! . Il met au cœur de notre exercice d’architecte notre responsabilité sociale et renforce notre humanité. Transformer l’EHPAD est un véritable challenge : il doit être une véritable maison pour une grande diversité de résidents, tout en étant adapté aux différentes pathologies pour accompagner la prise en soins des personnes. Il doit aussi rester viable économiquement, tant en matière de construction que d’exploitation. Résoudre cette équation nécessite de repenser le cadre et les modèles existants pour imaginer des solutions à la fois désirables, faisables et viables.
Quels sont, selon vous, les éléments essentiels à intégrer dans l’architecture des EHPAD ?
Dans notre dernier ouvrage, Aménagement des lieux de vie collectifs dans le champ du grand âge et du handicap, co-écrit avec Florence Mathieu (Eyrolles, 2025), nous proposons un cadre inscrit dans cinq dimensions clés. La beauté et la domesticité, pour faire de ces lieux une promesse de bonheur. La qualité d’usage, afin que chacun puisse utiliser les espaces à sa convenance. L’adaptation, pour compenser les difficultés rencontrées par les personnes. L’ergonomie, nécessaire à la qualité de vie au travail des professionnels. Et enfin l’autodétermination, qui doit être privilégiée autant que possible, car avoir le choix est indispensable pour se sentir chez soi.
Pour améliorer l’architecture des EHPAD, doit-on forcément passer par la construction de nouveaux bâtiments ?
Pas nécessairement. Quelle que soit la structure, neuve ou existante, certains choix spatiaux peuvent apporter des améliorations significatives. Chaque modification, qu’il s’agisse d’une simple peinture ou du changement d’un équipement, peut contribuer à une transformation positive. C’est avant tout une question de regard et de considération.
Mais la question financière n’est-elle pas un frein ?
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, pour faire mieux, il ne faut pas toujours faire plus, il faut avant tout faire autrement ! Par exemple, nos projets montrent qu’il est tout à fait possible de concevoir des logements de petite taille (27-30m2) à superficie globale constante, en réduisant les circulations intérieures avec un modèle pavillonnaire. De plus, il existe dans le commerce des équipements à la fois esthétiques et adaptés, souvent moins coûteux que le mobilier spécialisé. Alors certes, tout cela demande plus de temps pour la réflexion et la recherche, mais pas nécessairement plus de budget.
Vous avez travaillé sur le « co-design » en EHPAD. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Le co-design consiste à associer les résidents, leurs familles et les professionnels à la conception des aménagements et des organisations. Cette approche garantit une meilleure adéquation entre les aménagements et les besoins réels des usagers. Elle permet également d’assurer la désirabilité et la sécurisation des solutions mises en place. Enfin, cette concertation systématisée révèle des divergences et des nuances selon les territoires, permettant ainsi de sortir de visions ou de modèles standardisés.
> Article paru dans Ehpadia #39, édition d’avril 2025, à lire ici
Fany Cérèse : Durant mes études d’architecture, j’ai remporté le concours d’idées de la CNSA en 2007, visant à imaginer les maisons de retraite de demain. Cette expérience m’a conduite à travailler au sein de la Maison de Retraite Protestante de Montpellier, où j’ai réaménagé les espaces afin que les résidents s’y sentent chez eux. Après trois années enrichissantes, cette expérience a nourri mon sujet de diplôme puis de doctorat en architecture, intitulé Environnement architectural, santé et domesticité : étude des effets d’un aménagement architectural domestique sur la qualité de vie, l’usage et la perception de l’espace dans les lieux de vie institutionnels pour personnes âgées.
Vous avez ensuite cofondé l’atelier AA - Architecture Humaine. Quelles en sont les ambitions ?
En 2016, à l’issue de ma thèse, j’ai effectivement cofondé cette une agence spécialisée dans la transformation de l’offre médico-sociale, avec une approche domiciliaire et inclusive. Notre démarche repose sur une base scientifique solide : nous avons l’agrément Crédit impôt recherche, nous publions des articles scientifiques, et nous collaborons avec des doctorants et jeunes docteurs. Nos travaux portent sur les besoins environnementaux des personnes atteintes de troubles neuro-évolutifs, ainsi que sur les liens entre environnement et neurodéveloppement moteur et sensoriel. Nous nous intéressons aussi à l’impact architectural et spatial sur le bien-être des usagers (résidents, proches, professionnels), l’autodétermination, les troubles du comportement et les interactions sociales.
Pourquoi cet intérêt particulier pour le grand âge et les EHPAD ?
Le sujet est tout simplement passionnant ! . Il met au cœur de notre exercice d’architecte notre responsabilité sociale et renforce notre humanité. Transformer l’EHPAD est un véritable challenge : il doit être une véritable maison pour une grande diversité de résidents, tout en étant adapté aux différentes pathologies pour accompagner la prise en soins des personnes. Il doit aussi rester viable économiquement, tant en matière de construction que d’exploitation. Résoudre cette équation nécessite de repenser le cadre et les modèles existants pour imaginer des solutions à la fois désirables, faisables et viables.
Quels sont, selon vous, les éléments essentiels à intégrer dans l’architecture des EHPAD ?
Dans notre dernier ouvrage, Aménagement des lieux de vie collectifs dans le champ du grand âge et du handicap, co-écrit avec Florence Mathieu (Eyrolles, 2025), nous proposons un cadre inscrit dans cinq dimensions clés. La beauté et la domesticité, pour faire de ces lieux une promesse de bonheur. La qualité d’usage, afin que chacun puisse utiliser les espaces à sa convenance. L’adaptation, pour compenser les difficultés rencontrées par les personnes. L’ergonomie, nécessaire à la qualité de vie au travail des professionnels. Et enfin l’autodétermination, qui doit être privilégiée autant que possible, car avoir le choix est indispensable pour se sentir chez soi.
Pour améliorer l’architecture des EHPAD, doit-on forcément passer par la construction de nouveaux bâtiments ?
Pas nécessairement. Quelle que soit la structure, neuve ou existante, certains choix spatiaux peuvent apporter des améliorations significatives. Chaque modification, qu’il s’agisse d’une simple peinture ou du changement d’un équipement, peut contribuer à une transformation positive. C’est avant tout une question de regard et de considération.
Mais la question financière n’est-elle pas un frein ?
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, pour faire mieux, il ne faut pas toujours faire plus, il faut avant tout faire autrement ! Par exemple, nos projets montrent qu’il est tout à fait possible de concevoir des logements de petite taille (27-30m2) à superficie globale constante, en réduisant les circulations intérieures avec un modèle pavillonnaire. De plus, il existe dans le commerce des équipements à la fois esthétiques et adaptés, souvent moins coûteux que le mobilier spécialisé. Alors certes, tout cela demande plus de temps pour la réflexion et la recherche, mais pas nécessairement plus de budget.
Vous avez travaillé sur le « co-design » en EHPAD. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Le co-design consiste à associer les résidents, leurs familles et les professionnels à la conception des aménagements et des organisations. Cette approche garantit une meilleure adéquation entre les aménagements et les besoins réels des usagers. Elle permet également d’assurer la désirabilité et la sécurisation des solutions mises en place. Enfin, cette concertation systématisée révèle des divergences et des nuances selon les territoires, permettant ainsi de sortir de visions ou de modèles standardisés.
> Article paru dans Ehpadia #39, édition d’avril 2025, à lire ici